M. Rehemtulla - CC BY-SA 3.0

La science se cachant derrière le sirop d’érable

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Par Chantal Mustoe, co-éditrice, Chimie

Février tire à sa fin et partout au pays, les érables seront bientôt entaillés afin de recueillir leur sève sucrée. Étape 1 : Percer un petit trou. Étape 2 : Insérer un chalumeau. Étape 3 : Enfoncer légèrement le chalumeau à l’aide d’un marteau. Étape 4 : Suspendre une chaudière sur le chalumeau et regarder le liquide clair comme de l’eau couler dans la chaudière.

Audubon Center of the North Woods, CC BY 2.0

La collecte de la sève sucrée provenant d’un érable. Photo : Audubon Center of the North Woods, CC BY 2.0

Ceci n’est que le début d’un procédé qui transformera ce liquide sucré provenant du xylème de l’érable en ce délicieux liquide collant que l’on met sur les crêpes, les gaufres, le poulet frit… bref, sur tout ce que vous désirez.

Pourquoi entaille-t-on les arbres à ce moment-ci? La sève coule lorsque les températures durant le jour sont juste au-dessus du point de congélation (0ºC) et les températures durant la nuit juste au-dessous de 0ºC. Ces cycles de congélation-décongélation entraine le gel et dégel de l’eau contenue dans l’arbre, ce qui, en retour, cause des pressions positives et négatives en alternance dans le système de transport de la sève du xylème. La saison se termine lorsque les feuilles apparaissent car l’eau transpirera maintenant des feuilles par le biais des stomates et libèrera toute pression accumulée. Mais au printemps, lorsque seuls les bourgeons recouvrent les branches, cette pression accumulée force la sève à sortir par le chalumeau jusque dans les chaudières.

Depuis des centaines d’années, nous avons recueilli la sève des érables au début du printemps, et les peuples autochtones décrivent cette période de l’année par des noms tels que « lune d’érable et lune de sève ». Les premières méthodes de récolte de sève utilisaient des pierres chaudes pour réchauffer la sève et les températures hivernales pour la refroidir. Même si les façons de récolter et de transformer la sève ont changé au fil des siècles, deux choses n’ont pas changé : la période pendant laquelle on récolte la sève et la chimie qui rend possible la transformation de la sève en sirop d’érable.

La première étape de cette transformation consiste à retirer 98% de l’eau contenue dans la sève! C’est ce qui rend possible le processus chimique de cristallisation. Le fait que nous pouvons causer ou empêcher la cristallisation en induisant différentes températures, différentes vitesses de refroidissement et différents taux de brassage rend possible la diversité de produits de l’érable tels que le sucre, le sirop, le beurre et la tire.

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Il faut bouillir la sève afin d’augmentater la saturation en sucre. Photo : Audubon Center of the North Woods, CC BY 2.0

La cristallisation du sucre se produit lorsque la solution devient saturée en sucre, c’est-à-dire lorsque la solution contient le maximum de sucre pour une certaine température. Une solution saturée en sucre à température ambiante (23ºC) contient 68% de sucre, et 83% de sucre à 100ºC. Comparez cela à la sève d’érable, qui comprend plus de 95% d’eau!

Qu’est-ce que la cristallisation vient faire là-dedans? La deuxième étape de la transformation de la sève requiert un refroidissement. Si une solution sucrée chaude et saturée est refroidie en la mélangeant afin de remuer les molécules, elle devient soudainement sursaturée, et le sucre se cristallise. C’est comme ça que l’on fait le beurre d’érable! La sève est bouillie jusqu’à ce que la solution soit saturée, et ensuite refroidie lentement en mélangeant afin d’encourager les cristaux à se former. Ces petits cristaux donnent au beurre d’érable sa texture unique et son opacité, comme un vieux pot de miel qui cristallise depuis des années.

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Des millions de minuscules cristaux d’érable diffractent la lumière et donnent au beurre d’érable sa couleur opaque. Photo : necopunch CC BY-NC-ND 2.0

D’un autre côté, la translucidité du sirop d’érable requiert qu’on empêche la cristallisation pendant le refroidissement. La sève est chauffée à de hautes températures et ensuite refroidie rapidement sans mélanger. Si on enlève trop d’eau, on obtient du beurre d’érable.

Un troisième produit de l’érable, qu’on appelle la tire d’érable, est causé par un procédé de refroidissement encore plus « cool », et pas seulement parce qu’on le fait sur la neige. La tire d’érable est refroidie si rapidement qu’elle devient du verre fait de sucre. Le verre solide, comme votre fenêtre ou la tire d’érable sur la neige, sont des solides qui se forment tellement vite que les cristaux n’ont pas le temps de se former.

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Tire d’érable. Photo : Pxhere images C0

Pendant le chauffage et le refroidissement, d’autres réactions chimiques telles que la caramélisation et la réaction méconnue de Maillard, entrainent les différences de couleurs du sirop d’érable. La caramélisation est causée par le chauffage des sucres jusqu’à ce qu’ils se brisent et forment d’autres délicieux composés chimiques, et la réaction de Maillard cause le brunissement des aliments lorsqu’ils sont chauffés. Elle rend la pizza, les raviolis chinois cuits à la poêle et le sirop d’érable délicieux en recombinant les acides aminés et les sucres des aliments pour produire différents composés chimiques goûteux. Les différentes classes de sirop d’érable (clair, ambré, foncé) dépendent de l’intensité des réactions de Maillard et de caramélisation pendant le chauffage de la sève.

Dvortygirl - Own work, CC BY-SA 3.0

Les différentes classes de sirop d’érable. Photo : Dvortygirl – Own work, CC BY-SA 3.0

On peut prédire la façon dont la réaction de Maillard se produira par le contenu en sucre de la sève. On trouve trois types de sucres dans le sirop d’érable : le glucose, le fructose et le saccharose, mais seuls le fructose et le glucose sont impliqués dans cette réaction. Des processus microbiens se produisant dans l’arbre modifient les concentrations relatives de ces sucres en décomposant le saccharose en fructose et glucose. Comme les processus microbiens se produisent plus rapidement à des températures plus chaudes, la composition en sucre de la sève change pendant la saison. La réaction de Maillard causant le brunissement des concentrations plus importantes de fructose et de glucose vers la fin de la saison donne un sirop plus foncé et plus goûteux.

La transformation de l’eau d’érable en délicieux produits de l’érable est une question de réactions chimiques causées par un changement de température. Alors la prochaine fois que vous maudirez les températures froides, faites-vous une bonne tire d’érable et rappelez-vous que sans le temps froid (et sans ces réactions chimiques délicieuses), nous n’aurions pas de sirop d’érable!

Connie Tang, enjoying maple taffy

L’éditrice de la section Chimie de Science Borealis, Connie Tang, savoure une délicieuse tire d’érable!

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Photo par M. Rehemtulla – CC BY-SA 3.0

Cet article à été traduit par Dominique Melançon. Read the original article in English.

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