Ainslie Butler, éditrice Santé, Médecine et science vétérinaires
Un récent rapport publié dans la revue Science présentait un nouveau test sanguin de dépistage du cancer, nommé CancerSEEK, lequel promet d’améliorer dramatiquement le taux de diagnostic cancéreux. Cet outil de dépistage, qu’on appelle une « biopsie liquide », a été développé à l’école de médecine de l’université Johns Hopkins. Il effectue le dépistage de huit types communs de cancer en recherchant des mutations de l’ADN et des protéines inhabituelles dans le sang.
Que cela représente-t-il pour les canadiens? Selon deux rapports récents, Ontario Cancer Statistics et les Statistiques canadiennes sur le cancer, il est prévu qu’un canadien sur deux recevra un diagnostic de cancer, et qu’un sur quatre en mourra. Le taux de diagnostic de cancer a augmenté légèrement au Canada, surtout chez les femmes, alors que le taux est demeuré stable depuis 15 ans en Ontario. La mortalité due au cancer a diminué depuis les années 80, malgré que les taux de diagnostic et de survie varient en fonction de la région, de l’âge et du sexe. Une des raisons expliquant cette diminution est l’amélioration continuelle des tests pour diagnostiquer la maladie.
Comme on peut s’y attendre, les tests diagnostiques jouent un rôle important pour la détermination du taux de diagnostic de cancer au Canada. Les avancées de la recherche médicale ont apporté de meilleurs tests, qui sont plus rapides, plus efficaces et (généralement) plus abordables, et peuvent détecter certains cancers plus tôt que jamais. La plupart des gens connaissent certains tests de dépistage comme la colonoscopie et la mammographie; les cancers du colon et du sein sont les types de cancer les plus souvent diagnostiqués, mais ils sont également les plus meurtriers.
Bref, plus il existe de tests spécifiques à certains types de cancer, plus on aura de chances de les dépister, surtout pendant les premiers stades. C’est là que CancerSEEK entre en jeu. Les résultats préliminaires sont égaux ou supérieurs aux taux de détection d’autres outils de dépistage similaires. Mieux encore, ce test sanguin est une méthode non invasive simple qui peut détecter plusieurs types de cancer, comme le cancer des ovaires, du foie, de l’estomac, du pancréas et de l’Å“sophage, pour lesquels on n’a pas de dépistage de routine.
S’il est approuvé, sa relative simplicité sera l’avantage majeur de CancerSEEK par rapport à d’autres tests de dépistage. Un sondage effectué en 2014 auprès des foyers canadiens a révélé que presque la moitié des gens qui devraient subir un dépistage du cancer du colon n’était pas à jour sur ce point. Les visites chez des spécialistes et les procédures invasives peuvent représenter des obstacles empêchant les gens de compléter les dépistages recommandés. Certaines procédures comme les colonoscopies peuvent demander un jeûne, une purge et/ou une sédation, et peuvent être autant intimidantes que perturbatrices.
Les gens vivant dans des régions éloignées n’ont peut-être pas accès à des spécialistes près de chez eux, et il peut également être difficile de se rendre aux bureaux des spécialistes en régions urbaines. Qui plus est, certains canadiens peuvent devoir attendre très longtemps afin de subir leur dépistage à cause de la capacité limitée, et ce, même s’ils sont considérés être à risque.
Des chercheurs ont testé CancerSEEK sur plus de 1000 patients atteints du cancer et ont conclu que le test émettait un diagnostic correct dans environ 70% des cas (sensibilité). L’efficacité de cette méthode pour détecter le cancer varie entre les différents types et stades de cancer. Par exemple, elle a détecté avec succès 100% des cancers du foie dans les premiers stades, mais seulement 20% des cancers de l’Å“sophage dans les premiers stades.
Le test CancerSEEK a performé à son meilleur lors de la détection des cancers se trouvant dans des stades plus avancés, ce qui paraît sensé, car il y a normalement plus de dommages encourus par l’ADN et plus de protéines inhabituelles sont libérées, et c’est ce que le test prend en compte. Toutefois, le fait de diagnostiquer le cancer pendant les premiers stades offre plus d’opportunités de prévention et de traitement, et augmente les chances de survie des patients.
CancerSEEK a donné un diagnostic incorrect dans moins de 1% des cas, parmi 800 patients en santé (spécificité). Cela est comparable à la spécificité d’autres tests de dépistage du cancer tel que le test Pap. Toutefois, certains chercheurs craignent que CancerSEEK ne génère un plus grand nombre de résultats faux positifs auprès du grand public. Ces résultats faux positifs peuvent mener à d’autres tests ou traitements qui ne sont pas nécessaires, peuvent entrainer un stress et un fardeau financier en plus d’avoir des impacts sur la santé mentale.
CancerSEEK est encore dans la phase d’essais, et un essai comprenant 10000 personnes pendant 5 ans est en cours. Il existe des processus stricts et longs, autant au Canada qu’internationalement, qui mènent à l’approbation légale des nouvelles méthodes médicales. Ces processus sont en place pour s’assurer que les nouvelles technologies médicales sont sécuritaires et efficaces. Les autorités de règlementation doivent déterminer si les bénéfices qu’offrent ces nouvelles procédures sont plus importants que les risques, et doivent évaluer leur efficacité par rapport aux outils existants.
Si jamais CancerSEEK ou d’autres outils de « biopsie liquide » deviennent disponibles au Canada, il n’aura jamais été aussi facile de diagnostiquer le cancer pendant les premiers stades et d’augmenter vos chances de survie.
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Photo : Est-ce qu’un nouveau test sanguin pourrait changer la réalité du cancer au Canada? qimono, CC0
Cet article à été traduit par Dominique Melançon. Read the original article in English.